À l’occasion du Nouvel An lunaire, la République des Rédacs a voulu se pencher sur le plus grand marché de la région asiatique : la Chine. Avec son milliard quatre d’habitants, le pays est un formidable terrain de jeu pour les marques… À condition d’en connaître les rouages. Et de ne pas tomber dans les pièges tendus par la langue mandarine. Focus.

À vos marques, prêts, chinez

Se classant en première position des pays les plus peuplés du monde – devant l’Inde et les États-Unis -, la Chine représente un marché de choix. Pour les entreprises, s’y établir en ligne ou in situ constitue un Graal. Pour autant, la concurrence y est accrue. La contrefaçon prégnante. Le territoire immense. Les codes culturels distincts de ceux de l’Occident. Autant d’éléments qui transforment la course à l’implantation dans l’Empire du Milieu en véritable… casse-tête chinois. Un micmac qui commence par le choix d’adapter – ou non – le nom de sa marque.

Sous les idéaux, les idéogrammes

En cas d’internationalisation, il est courant de voir un nom s’adapter selon les pays. Ce procédé permet idéalement de rendre le nom plus facilement prononçable. Plus évocateur. Mémorisable. Ou encore de le distinguer d’un mot signifiant dans la langue du pays d’accueil. C’est ainsi que « Monsieur Propre » se fait appeler « Mastro Lindo » en Italie. Que « Danone » devient « Dannon » de l’autre côté de l’Atlantique. Et « Lay’s », « Sabritas » au Mexique.

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  • RREDACS_MAG_Chine_Mr Propre
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  • RREDACS_MAG_Chine_Sabritas
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La clientèle chinoise étant particulièrement friande de marques reconnues, l’exercice est là-bas primordial. Mais néanmoins périlleux. En cause ? L’absence d’équivalence alphabétique. La richesse des signes. La diversité des dialectes qui font qu’un nom peut avoir plusieurs prononciations.

S’échiner à s’adapter

À l’instar de Louis Vuitton qui a fait le choix de minimiser l’emploi de son nom chinois, certains mastodontes peuvent se permettre d’imposer leurs règles du jeu. Pour les autres, l’adaptation au marché chinois reste un enjeu majeur et donne lieu à plusieurs stratégies.

La première ? La translittération, soit la recherche de mêmes sonorités entre le nom d’origine et le nom chinois. Ici, la signification importe peu, les marques privilégieant la reconnaissance auditive de leur nom, souvent mondialement connu. C’est ainsi que Sony se prononce en Chine « Suo Ni », traduisible par « Explorer religieuse ». Si le procédé rend tout de même l’appropriation du nom compliquée, dans certains cas le sens peut même être négativement connoté. La chaîne américaine Best Buy en a fait les frais en optant pour la traduction « Bai Si Mai ». Bien que proche à l’oreille, celle-ci signifiait « Réfléchissez-y avant d’acheter » ! Raté.

Deuxième possibilité : la recherche de cohérence sémantique. À l’inverse de la translittération, la signification prime ici sur la sonorité, quitte à s’éloigner complètement du nom originel. Simple et efficace mais peu communicante, cette méthode est souvent utilisée pour les raisons sociales. C’est le cas d’EDF dont la traduction chinoise littérale donne « Ici France électricité ».

Troisième stratégie : associer le nom officiel et sa traduction libre en chinois. C’est sur cette solution qu’a misé Carrefour, qui affiche fièrement son nom en caractères latins ainsi que les sinogrammes « Famille et bonheur ». Un choix astucieux qui contribue à donner à l’enseigne une sympathie quasi patriote quand on sait que ces deux termes sont réputés pour porter chance en Chine et qu’ils s’affichent volontiers dans les décorations intérieures des maisons et autres cartes de vœux.

Dernière option, et non des moindres : l’adaptation sonore et sémantique du nom. Un challenge créatif qui peut parfois mener à la proposition de centaines de noms qui seront ensuite testés auprès d’experts sinophones. En la matière, Coca-Cola fait office de cas d’école. Employant la même allitération comme dans son nom d’origine, la marque se fait appeler en chinois Ke Kou Ke Lè, autrement dit, « Le bonheur en bouche ». Un joli coup.