Compositeur prolixe, musicien prodige, -M- est non seulement un poète mais aussi un professeur idéal en création de marques. La preuve par trois.
 MChedid Lamomali

Bon sang ne saurait mentir. Compositeur prolixe, musicien prodige, -M- a démontré depuis ses débuts qu’il est bien le petit-fils de sa grand-mère : un poète. Par ricochet, un magnifique inventeur de noms. Machistador, Amssétou, Mister Mystère… sa tracklist contient des modèles de marques. Dernière en date, Lamomali, nom de son tout nouvel album qu’il signe accompagné de Fatoumata Diawara, Toumani et Sidiki Diabaté. En infatigable manieur de mots, ce créatif touche-à-tout ferait un professeur idéal en création de marques. La preuve par trois.

Leçon 1
Soyez irrespectueux

De nombreux créatifs ont fait leur la devise « Rules are made to be broken ». -M- l’applique à la lettre. Pour trouver un nom de marque ou d’entreprise, elle est précieuse. Aujourd’hui, l’intégralité des mots du dictionnaire est déposée. Pire, quand vous trouvez un mot valise, ajoutez un suffixe à une racine latine ou compactez de l’anglais, il y a de fortes malchances pour que quelqu’un d’autre y ait pensé avant vous. Comment s’en sortir ? Il faut casser les règles, les mots, les sons. Ça doit devenir un jeu. Un plaisir. Ça peut être infime. Et tout changer. Dans Lamomali, une lettre intervertie, une autre escamotée, et ça suffit. Cet accident créatif, c’est l’étincelle salvatrice.

Leçon 2
Soyez musical

Pour un musicien, c’est une évidence. Pour un chercheur de nom, ça doit le devenir. Une marque qui se mémorise, c’est un petit morceau de musique. Des études ont montré que la mémoire musicale est la plus forte. Quand nous aurons presque tout oublié, il nous restera des chansons. Alors faites chanter votre nom. Cultivez votre oreille musicale. Détachez-vous du sens pour vous concentrer sur le son. Lamomali, ça claque. Quatre syllabes, deux blocs lamo/mali comme en miroir, des voyelles a-o-a-i qui vocalisent. -M- fait ça naturellement. Son dernier album est cossigné avec Fatoumata Diawara, Sidiki le fils et Toumani Diabaté sa légende de père. Pour lui rendre hommage, -M- lui dédie une chanson. Comment l’auriez-vous appelée ? Manitoumani évidemment !

Leçon 3
Soyez profond

Se faire plaisir, jouer avec les lettres, se concentrer sur la musicalité du nom n’empêche pas d’être sérieux. C’est même une obligation. Votre nom est vecteur de sens. La combinaison ultime, c’est quand l’originalité formelle rencontre la profondeur. Qu’est-ce que vous avez à raconter ? Pouvez-vous le dire en un mot ? Reprenons Lamomali. Que nous dit ce remplacement du N par le M ? Dans « Un secret », Philippe Grimbert expliquait comment la transformation de son nom de famille, le M pour le N, le T à la place du G, servait à masquer l’horreur de l’holocauste. -M- c’est son nom. Comme un emblème. Il dit M. Dans son titre fondateur, Matthieu Chédid le clamait : la haine je la jette. Alors le N aussi. Le titre de ce dernier album fait écho à ce crédo. Un blanc au Mali, ça pourrait être une anomalie… avec de la haine. Avec du aime, ça devient une âme au Mali. Une déclaration d’amour à un peuple et à un pays. Par les temps qui courent, tout sauf de la légèreté.